Embellie

J’ai pleuré, j’ai parlé, j’ai été grande et belle, j’ai été mesquine et de mauvaise humeur, je me suis plainte, j’ai été exécrable, j’ai bêché et rebêché ma colère, j’ai voulu courir mais on n’avait plus de douche, j’ai cassé des carreaux, j’ai coupé 30 centimètres de cheveux et je suis devenue rousse, j’ai crié que oh ça va là j’encaisse et je suis fragile alors merde fais gaffe, j’ai eu les yeux mouillés, j’ai été jalouse des ventres ronds des inconnues, j’ai manqué de défaillir au « mais il est parti où le bébé secret maman ? », j’ai réexpliqué en gardant mes larmes pour plus tard.

Et en même temps, la vie toujours, côté lumière, les courgettes du jardin, les tomates du marché, les livres que je lui lis et relis, le salon de thé et « est-ce que je peux mettre un sucre dedans et manger l’autre sucre, maman ? », la fiction qui revient, timide, bourgeonnante, les tiramisus et les nonalitos, les cheveux de N. et ses caresses, le hennissement faible et plein d’attente de Ponette qui espère une friandise, les rendez-vous de l’été tellement rempli qu’il me semble presque déjà consumé, l’amie à l’autre bout du monde et son sourire sur tout l’écran, les trésors des vide-greniers, les conversations au parc et l’espoir.

Je vais bien.